A chaque fois qu’il m’est arrivé d’aborder mon homosexualité avec des étrangers (expatriés ou citoyens ne résidant pas en Afrique), cette question est toujours revenue : comment est-ce d’être gay en Afrique ? Une fois pour toutes, je vais donner mon point de vue qui servira de point de départ à toute discussion sur le sujet.
- Etre gay en Afrique, c’est n’avoir aucune éducation
Par parce qu’on le désire. Juste parce que le parent estime qu’il n’a aucune obligation à s’acquitter du droit à l’éducation d’un « perdu ». Car oui, être gay en Afrique, c’est être « vendu », un sous-homme en quelle que sorte. Raison pour laquelle vous trouverez de nombreux gays peu ou pas assez éduqués. Et pourtant Dieu seul sait combien les gays sont talentueux et créatifs.
- Etre gay en Afrique, c’est manquer de soins de santé ou ne pas en bénéficier du tout.
Un médecin peut décider de ne point vous prodiguer de soins si un seul instant il se doute de votre orientation sexuelle. De nombreux militants en ont perdu la vie. Sans susciter le moindre émoi de leurs proches. « Bon débarras » disent-ils en leur cœur. « La honte n’est plus ». De nos jours, de nombreux centres communautaires ont vu le jour par la volonté de certains leaders afin de diminuer les décès des membres de la communauté. Bien évidemment, ces derniers exercent sous couverture afin de s’éviter toute fermeture abusive. L’homosexualité étant interdite.
- Etre gay en Afrique, c’est passer maître dans l’art du camouflage avec la frustration pour ami.
Ta copine est souvent ta meilleure amie ou ta camarade de classe pour ta famille, une parente proche ou éloignée selon le lien social que tu as avec tes amis. Ma copine m’a fait passer pour sa nièce pendant un an sans que je puisse y changer quoi que ce soit. Je l’ai regardé se faire draguer, peloter sans ne pouvoir rien faire d’autre que sourire. Car au moindre écart, j’étais à la merci du point 4. Une de mes amies a présenté sa copine à son mari comme étant une de ses relations de travail. Travail qu’elle n’avait plus depuis un an au moins. Les explications, il n’avait qu’à les trouver de lui même. Et c’est ainsi. Tous les jours. Tu mens à tout le monde. Et si tu n’y prends garde, tu finis par te mentir à toi-même à force de jouer des personnages.
- Etre gay en Afrique, c’est risquer sa vie TOUS les jours.
Chantage, escroquerie, viols, arrestations, tortures, meurtres, séances d’exorcisme tout y passe. Chaque jour tu vis en te priant pour que ton outing n’arrive jamais. Surtout pas par voie de presse. Indépendamment du pays, la réalité est la même. Même pour l’Afrique du Sud dont l’administration est pourtant favorable aux droits des gays. David Kato en Ouganda, Eric Lembembe a Cameroun, …Et de nombreux cas ne parviennent jamais aux oreilles des médias. Tu élèves la voix, la prison t’accueille facilement. Ou le cimetière tiens. Et pas besoin de preuves. La parole du plaignant l’emporte presque toujours. Elle se fonde sur ton accoutrement, tes fréquentations, tes habitudes alimentaires voire tes liens sociaux. Ce qui nous conduit au point 5
- Etre gay en Afrique, c’est surtout et avant tout, rester dans son placard et le fermer à double tours.
Si dans l’échelle sociale tu te situe en dessous de l’animal, à quoi cela te serti-il de montrer ton nez dehors ? Restes-y et vis tes frustrations en paix. Et c’est ce que nous faisons. Chaque jour. En admirant le monde de notre serrure, nous demandant à quand notre tour, les moindres velléités étant réduites au silence. Des David Geto, Eric Lembembé, Eudy Simelane, Noxolo Nogwaza il y en aura encore et toujours. Car tant que les gouvernements africains n’auront pas pris position, les enfants des autres continueront de subir au nom de la sacro sainte culture africaine.
Allez, pour la route, je vous laisse en compagnie de “l’Homosexualité vue d’Afrique” avec le camerounais Thierry Ntamack.
Miaou!
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